Vingt-neuvième long-métrage de son auteur (!), "Passion" est un thriller psychologique pas désagréable, ressassant toutes les obsessions du maître Brian (voyeurisme, amours saphiques, dualité des personnages, jeu sur la réalité et l'illusion...), mais il ne s'agit pas d'un film aimable, de nature à réhabiliter son controversé réalisateur.
Les spectateurs les moins indulgents parleront même de téléfilm à gros budget, desservi par quelques scènes volontairement kitsch qui frôlent le ridicule, avec un De Palma s'auto-parodiant sans vergogne, célébrant la laideur et le mauvais goût avec un certain panache et une ironie mordante.
Tout au long d'un récit trouble et cynique aux accents hitchcockiens, De Palma s'ingénie à distiller une ambiance malsaine, instaurant un rapport de séduction et de manipulation entre ses protagonistes, tour à tour dominant(es) et dominé(es) dans ce jeu de dupes.
"Passion" reste donc un exercice de style assez savoureux, à la réalisation soignée (photo élégante, BO entêtante, split screens), mais qui ne joue pas suffisamment la carte de l'érotisme : ainsi, la jolie Rachel McAdams porte très bien le pantalon tailleur, mais manque vraiment d'ambiguïté et de perversité pour incarner un tel personnage.
De Palma aurait sans doute dû exiger une plus grande mise en danger de son actrice principale, en lui imposant des scènes de sexe plus réalistes (voire dénudées, tant qu'à faire!) qui auraient peut-être boosté son implication, et évité cette sensation frustrante de film pseudo sulfureux qui ne s'assume pas vraiment...
Au final, cette escapade berlinoise (le film bénéficie de financements allemands et français) n'est donc pas une franche réussite pour Brian De Palma, son remake du "Crime d'amour" d'Alain Corneau n'ayant pas rencontré un grand succès commercial ni même critique.
"Passion" est donc à réserver principalement au noyau dur des fans du cinéaste italo-américain.