Bouleversant et émouvant. Documentaire d’une très grande sensibilité qui nous montre le combat quotidien d’une petite fille et de sa famille pour être acceptée en tant que telle quand son sexe de naissance est celui d’un petit garçon.
Sasha née garçon, a cependant très tôt manifesté sa féminité et le témoignage poignant de sa maman, qui raconte les larmes de désespoir qui ont été celles de son enfant lorsque vers l’âge de 3 ou 4 ans alors qu’il lui disait que plus grand il sera une petite fille et qu’elle lui a répondu que ce ne serait pas possible. La réaction désespérée de Sasha lui a alors fait comprendre que ce n’était pas une lubie passagère, mais bel et bien une question d’identité. Est pointé ici le fait que la norme sociale qui veut que le sexe biologique corresponde de facto au genre psychologique n’est pas si évidente, et que pour certains cette apparente simplicité est en réalité une épreuve et une incohérence.
Si la famille, que ce soit la maman pour qui le combat de sa fille est son sacerdoce, le papa qui lui est dans l’acceptation que Sasha soit une fille ou des frères et sœurs, mais aussi la tolérance et l’acceptation dont font preuves les enfants face au cas de Sasha, s’oppose à la vision sclérosée d’une partie des adultes, notamment le milieu scolaire qui fait montre d’une intolérance assez monstrueuse et qui ne prend même pas la peine d’assister à la réunion d’information où pourtant est présente le médecin qui suit Sasha pour comprendre qui est Sasha. Je ne peux m’empêcher de faire un parallèle avec les problèmes d’harcèlement scolaire qui touchent bon nombre d’enfants, avec souvent des conséquences majeures sur leur psychisme et leur développement et face auxquels l’école n’oppose souvent que mépris ou feint d’ignorer les réalités. Dans tous les cas, on regrette qu’une meilleure formation des enseignants à ces questions ne soit pas envisagée.
La maman soulève aussi les questions légitimes de sa responsabilité, son désir de petite fille et sa déception avouée d’avoir un garçon a-t’elle pu jouer ? La mixité du prénom est il facteur expliquant l’identité que Sasha ressent malgré son corps lui disant le contraire ? Là encore des histoires de normes résultants de la société qui tend à mettre la maman, plus particulièrement que le papa, dans le rôle non plus de la génitrice mais dans celui de celle qui transmet ses tares et ses névroses fondées ou pas.
On sent tout au long du documentaire la douleur de Sasha, et l’on imagine le drame qu’elle peut vivre, en particulier au sein de l’école où malgré l’absence de la caméra, les échanges avec le psychologue et sa profonde tristesse indiquent clairement qu’elle y subit brimades et agressions psychologiques lourdes, encore une fois de la part des adultes sensés la protéger et l’aider à s’épanouir. L’épisode du cours de danse est aussi très violent.
Le documentaire n’élude pas ces questions, au contraire il nous met face à nos contradictions, il nous expose la réalité des personnes trans-genres, et il faut rappeler que ces personnes ont en moyenne une espérance de vie plus courte, en raison des agressions dont elles sont victimes, de l’intolérance, de la lourdeur et de la lenteur de l’administration à reconnaître leur statut - exemple personnel, j’ai un ami né femme , opéré depuis déjà 5 ans car homme dans son acceptation de qui il est et qui aux yeux de la loi et de l’administration reste une femme, avec toutes les discriminations et les difficultés que cela engendre - la maman d’ailleurs ne se fait aucune illusion quant aux difficultés que devra traverser sa fille, elle sait que des personnes nuisibles lui feront du mal, qu’elle aura à subir moqueries et rejets. Espérons que ce film aide à changer les mentalités et la compréhension.
En tout cas Sasha est une magnifique petite fille, dont la douleur et le combat nous donne envie de la serrer fort dans nos bras, pour lui dire qu’on l’aime et qu’elle a le droit de vivre une vie normale dans le genre qu’elle estime être le sien. Je serais très curieux si cela est prévu d’avoir de ses nouvelles dans quelques années, à l’adolescence par exemple ou les questions d’hormones et de sexualité se poseront, la société aura-t’elle évoluée d’ici là ? Quelles difficultés envisagées ou pas devra-t’elle surmonter ? Quelles joies et quels bonheurs seront les siens.
Une ode à la tolérance indispensable.