À l'heure où sous l'écorce, jaillit la force
D'emblée, un frisson passe et pose un voile nauséeux.
La caméra caresse au plus proche le quotidien, une banlieue pavillonnaire banale et lui donne l'allure d'un jardin de la terreur. L'atmosphère n'inspire rien qui vaille.
Tout peut arriver et devine, c'est le pire qui se pointe.
Hugh Jackman habité de rage et de désespoir, tellement loin de son Wolverine de pacotille, se met à nu dans un rôle implacable et dévoile sa part d'ombre. Aveuglé, enragé, inhumain, terrifiant, il chevauche à flanc de certitudes, joue à LA ROULETTE RUSSE avec sa conscience.
Et pourtant, malgré ses excès, on est avec lui, enfin moi, quoiqu'il fasse, dans les larmes comme dans son escalade de la folie et c'est la grande force du récit de Villeneuve. Cette empathie malsaine pour ce père au bout du bout, vomissant sa violence, sa seule alternative, comme un pansement illusoire posé sur sa profonde détresse.
Prisonnier de sa douleur.
Face à lui dans ce drame, alors qu'il s'obstine à vouloir être son allié, Jake Gyllenhaal (profite, j'ai le droit d'écrire son nom une fois par trimestre et c'est là. J'ai un mot du médecin.) s'en sort proprement avec un vrai rôle de merde, carrément ingrat. Le flic éclatant d'impuissance et qui patauge grave.
Prisonnier de son incapacité à résoudre cette affaire.
C'est marrant, en le voyant cligner des yeux avec la régularité du joueur de tennis qui se remet les roubignoles en place, j'ai pensé à Brad Pitt dans Se7en. Sauf que Monsieur Jolie se grattait la tête avec la constance du footballeur qui se mouche à l'africaine à l'endroit même où il va bientôt se vautrer.
La comparaison avec l'autre film d'ambiance noire de noire qu'est le Fincher s'arrête là pour ma part. La mise en scène de Denis Villeneuve souligne sans artifice, te pose en satyre complaisant, sans abuser des ficelles propres aux thrillers. On pense évidemment au livre de Patrick Sénécal et au film de Daniel Grou, «Les Sept jours du Talion».
Ici, si tu as un poil de jugeote, tu peux trouver que le mec prend son temps dans sa révélation finale. Mais est-ce que c'était le but ?
Comme ces gens qui ralentissent pour jeter un œil à l'amas de ferraille et de chair mélangés sur le bord de la route, on est pris à témoin d'une descente aux enfers.
J'aime à penser qu'on est prisonnier de notre voyeurisme morbide.
Alors je le pense.