Strangely Tragic

Déjà, premièrement, on va redire le plus évident qui a été dit dix mille fois. OUI, le film ressemble UN PEU TROP à Epic ou les Chroniques de Spiderwick. Et OUI, il y a trop de chansons...

Strange Magic, de quoi ça parle ? C'est l'histoire d'une princesse de la Forêt Magique qui doit épouser Gilderoy Lockhart, mais elle le surprend en train de la tromper, et du coup elle devient la chanteuse de Paramore (agrou). On suit également le méchant roi Bogue de la Forêt Sombre, à qui à défaut de vouloir mettre une châtaigne, on a envie de conseiller un bon psy. Et en gros bah il est trop méchant vu qu'il veut éradiquer les potions d'amour, et du coup comme personne veut faire comme lui, hop, il kidnappe la soeur de notre héroïne. S'ensuit une quête musicale où des nains, des gerbilles et des crapauds cherchent à retrouve la soeurette (insupportable au demeurant) tout en cherchant l'aval de la Fée Draguée, la meuf qui aide à pécho.

C'est un film produit et écrit par le légendaire George Lucas, le papa de Star Wars. On s'attend donc à une jolie claquouze au niveau visuel, bien que scénaristiquement, on a un peu peur d'un remake des dialogues de la prélogie... Eh bien c'est EXACTEMENT ce qu'il se passe, en (deux-mille) quinze fois pire.

L'ECRITURE :

Les dialogues sont aux fraises. Voilà, c'est dit. Il n'y a pas de finesse d'écriture, tout est dit et expliqué de long en large en travers, ALORS que visuellement, les personnages surjouent à fond. Donc quel besoin de verbaliser le tout si on voit ce qu'il se passe très clairement ? C'est dommage car le cinéma, c'est surtout un jeu d'images. Sinon, l'histoire est aussi problématique, car comportant un problème à mon sens énorme qui reviendra à la fin de cette critique dans sa propre catégorie. C'est juste que ça manque cruellement de rythme ET de cohérence dans le tout. Enfin, petit spoiler, mais tu fais pas un bal du printemps où TOUTE ta forêt est invitée et toi, en tant que roi, tu te dis pas qu'il faut un minimum de gardes... Bref.

LES PERSONNAGES :

Les personnages sont difficilement attachants. Il y a pour ça de nombreuses raisons, donc je vais les lister pour chaque personnage.

• Marianne : c'est une héroïne qui a toute les raisons du monde de s'énerver, mais le film lui fait passer son arc volutif de guerrière à Mach 20, donc on ne comprend pas bien comment et pourquoi elle agit ainsi... Elle est juste émo, en grand besoin d'un personnel de santé mentale, et SPOILER : sa love story finale est mal amenée.
• Bog : si tout le monde le pardonne parce que sa VO c'est Alan Cumming (je l'aimais trop dans Spy Kids), il reste mal écrit. Il est clairement le "méchant" qui en fait est gentil, bien que : sa violence est connue (les autres le craignent tous) ; il menace de mort ses hommes OU les tabasse, voire les tue (cf les champignons) ; il kidnappe une enfant (pour l'éternité s'il n'a pas ce qu'il veut) ; SPOILER : il a tenté d'utiliser une potion d'amour sur quelqu'un contre son gré. Et le pire, c'est que l'ENTIERETE du film aurait apparemment été évitable si SPOILER : il avait écouté deux minutes la Fée Dragée sans se la jouer "gniagniagnia j'entends pas".
• Diane : la petite soeur de Marianne est au début attachiante, avant d'être juste complètement casse-pieds. "Sugar pie, honey bunchhh, you know that I looove yoooouuu"... Insupportable, et ARRÊTE d'être superficielle deux minutes, par pitié... Et pourquoi tout le monde la valide comme ça ?
• Roland : Gilderoy Lockhart porte un nom, et ici, c'est Roland. A défaut de vouloir entendre sa chanson (hé hé), on aurait plutôt envie de lui écraser son poing dans la face tant il est insupportable. Le souci, si cela paraît bien fait de prime abord, est qu'en réalité, TOUT LE MONDE valide sa connerie ALORS que ses conneries faites sont sans cesse pointées du doigt. Un vrai petit Trump en plus beau et moins orange. Roland, gare au scénario (c'est de trop, sorry) (il finit... comiquement).
• Sunny : il est débile. Ah mais alors là, je peux pas me le saquer. Il essaie de pécho en FORCANT un max, il se la joue "je suis petit et mignon je sais pas ce que je fais ah ah", il a toutes les preuves pour se défendre contre Roland mais non, il a "trop peur", et ses chansons sont bancales... Mec, chante pas du Bob Marley sur scène, au milieu d'une foule, en faisant des coeurs de gros forceur avec les doigts pour pécho une gamine. C'est pas un red flag, c'est une cape rouge à ce stade.
• La daronne de Bog, Griselda : elle est TERRIFIANTE. Ah mais vraiment. Et elle a l'air d'aussi se moquer un peu des prétendantes qu'elle ramène à son choupinet, ce qui fait qu'elle doit pas être très nice. Pas cool pour elles.
• Le roi : il est con et inutile, à l'aaaaide. Il est : gros, sans caractère, et lent. En gros c'est son personnage, voilà, un gros patriarche qui à cause de sa bedaine ne peut plus voler (con, pour une fée). Il valide toutes les merdes de Roland, n'encourage pas ni n'encadre ses filles, il donne jamais son avis (à part pour être raciste PTDR) et il arrive après la bataille, littéralement (et on sait pas pourquoi vu qu'il avait déjà envoyé des équipes formées sur place, l'air confiant ; donc pourquoi venir ?). SPOILER : il s'évanouit quand ses filles trouvent l'amour parce que trop que c'est pas conventionnel. Pour le mec moustique, okay, pour le nain, t'es naze.
• La Fée Dragée : le problème de ce personnage est qu'il est insupportable de A à Z. C'est littéralement le Génie d'Aladdin au féminin physiquement, qui se transforme etc, mais elle cumule les malus. Elle est pas très sympa en général, elle peut clairement s'échapper mille et une fois mais elle est débile (la scène du faux échappatoire est HORRIBLE), elle crée une potion HYPER PROBLEMATIQUE à gogo et en plus, SPOILERS : elle aurait pu s'éviter ses années d'enfermement si elle se comportait pas comme une énorme gamine à faire la tête. Rien que pour ça, Bog, tu avais bien fait de l'enfermer.
• Les persos secondaires : ils sont tous relativement drôles, et leurs interactions sauvent souvent le scénario et surtout l'humour !!! Une pensée à eux puisqu'à cause des personnages principaux, ils se retrouvent tous à s'aimer de force à cause de cette drogue/potion de con.

LES CHANSONS :

Inégales, les chansons reprises dans ce film sont toutes issues de la pop culture. Si l'objectif est de les chanter avec les personnages du film, c'est raté : elles sont empêtrées dans les dialogues et n'ont donc pas de réel rythme sur lequel se baser pour chanter si l'on en a le coeur. Il est aussi à noter les mauvais choix de tessitures, où une chanson un des comédiens de coublage semble chanter et atteindre ses notes avec difficulté, avant de revenir la chanson d'après en fanfare parce que la production a ENFIN capté que tout le monde n'est pas une diva (cf : Roland et ses deux premières chansons). Le problème, bien que certaines chansons fonctionnent très bien (celle du château où Roland affronte Marianne), c'est qu'elles sont TROP nombreuses et encore une fois, inégales. Au bout de la quinzième fois que Bog chante "Cuz I'm eviiiiiiil", bah je pense qu'on avait compris, et puis c'est redondant... Et puis certaines chansons sont trop longues (cf : la dernière et celle du duel, raaah).

LA REALISATION :

Point réellement positif, la réalisation offre régulièrement de jolies séquences, notamment au début du film, où des plans vont s'alterner et transitionner magiquement, et où l'on voit une pointe de volonté jaillir du budget. Malheureusement, les séquences de danse sont bien souvent assez vides, SURTOUT les chorégraphies, où on n'a que trop peu de figurants à chaque fois qui ont des mouvements trop mécaniques (le bal du printemps où la forêt entière devrait se rendre et où on ne trouve que trois pimpins).

LES GRAPHISMES & L'ANIMATION :

Le film est super beau, rien à redire là-dessus. Rien que pour ça je vous invite à le regarder. Je tiens toutefois à souligner que les créatures sordides et effrayantes de la Forêt Sombre sont mille fois mieux faites que les créatures lambdas, ce que je trouve dommage et un peu inégal. Autrement, l'animation est souvent bonne, mais je trouve dommage que les mouvements soient aussi empotés, on a l'impression que nos protagonistes elfiques ou féériques sont lourdauds ou patauds.

LE VIOL :

C'est là que réside le problème principal du film. Le consentement. Les thématiques de potions d'amour sont TOUJOURS au cinéma hyper mal traitées, alors que ça a lieu dans des films pour enfants. Ici, la potion de la Fée Droguée ne fonctionne pas si la personne en face est déjà éprise de quelqu'un, très bien. Mais pourquoi marche-t-elle si on est "libre" ? Et pourquoi l'utiliser en premier lieu ??? Pour cela, Bog, Sunny et Roland sont condamnables. La notion de consentement dans ce film est très floue, tant le roi tente absolument de caser sa propre fille avec Roland. Marier sa fille au premier noble venu, c'est normal, me direz-vous ; oui, mais PAS avec un mec qui ne cache pas ses intentions de tromper ta lignée, de s'emparer de tes armées et de déclarer la guerre au premier venu !!! Roland est hyper problématique, mais Sunny aussi, on lui pardonne tout parce qu'il est trop quirky. La vérité, c'est qu'avec son bouc, on sait même pas quel âge il a, et si Dawn a 16 ans, on ne sait pas si lui il en a 18 ou 32. En outre, l'obsession de Diane de pécho tout homme qui bouge est dangereuse pour elle, et l'inaction de son père qui demande seulement à la grande soeur d'agir est alarmante.

LE DERNIER MAUVAIS PETIT MESSAGE :

Si on exclut le message de viol, il reste un problème de fond au film : il ne sait pas sur quel pied danser vis-à-vis des questions LGBTQIA+. Ce n'est pas intrinsèque au film, ce n'est pas obligé, mais deux problèmes résident. A la fin, un des monstres de la Forêt Sombre dévoile être une femelle : si on peut associer ça à une blague légèrement transphobe, il n'en est rien, car on sent le ton léger qui pointe juste du doigt l'aspect "poissonnière" du personnage, qui est d'ailleurs plus gueulard et débrouillard que son acolyte (avec qui il y a un feeling, hu-hu). PAR CONTRE, la vanne sur le bisou quand Sunny et le costaud sont propulsés et ligotés sur une tige de plante et s'embrassent à cause du piège, c'est non. Genre "beurk, c'est dégueu", c'est pas une blague grave en soi, c'est juste qu'ils ne s'aiment pas ; mais la vanne était CARREMENT évitable, et ça fait très "euh être gay c'est trop nul" alors qu'on est en 2015 à ce moment-là. Vous vouliez faire rire ? Bah vous n'aviez qu'à écrire un meilleur scénario, crotte !!!

Conclusion : je rage beaucoup. Rien de nouveau, je suis aigri. Le film, en soi, est sympa. J'en avais gardé un bon souvenir à l'époque, et j'en garderai de nouveau un bon souvenir, ou au moins potable, peut-être sympatique. C'est coloré, bien animé, l'humour fonctionne régulièrement, c'est beau, c'est mignon, on a envie de suivre les personnages. Mais sincèrement, le rythme est mal dosé, on se sent pris pour un idiot tant tout est expliqué (et ce très mal, d'ailleurs), et le film a un ton profondément niais. Un chouette film sympa en famille, mais s'il marque par sa forme, sa DA (Direction Artistique), il ne restera pas dans les mémoires pour son contenu.