Après l’excellent Revenge dont la violence graphique avait marqué les esprits, Coralie Fargeat confirme tout son talent avec The Substance qui provoque une onde de choc au dernier Festival de Cannes où il remporte le prix du meilleur scénario.

En recevant la Palme d’or à Cannes en 2021, Julia Ducournau avait déclaré : « Merci de laisser entrer les monstres ». On pourrait dire que Coralie Fargeat a pris cette annonce pour une invitation. La monstruosité en question n’appartient pas seulement au monde de l’imaginaire. Elle est aussi normalisée au sein de la société ce qui la rend d’autant plus violente.

Ainsi, la violence du film exercée par le regard masculin à l’égard des femmes est à la hauteur de celle du sexisme de la société. The Substance prend place à Los Angeles où prônent les émissions de fitness qui objectivent le corps féminin par son hyper sexualisation.

Elisabeth Sparkle, ancienne sportive célèbre, appréhende la fin de sa carrière suite à l’aveu de son producteur véreux. Un mystérieux mot glissé dans sa veste lui révèle l’existence d’une substance capable de générer une nouvelle version d’elle-même.

Le minutieux travail sonore crée une ambiance étrange et angoissante afin de retranscrire l’état mental du personnage. Les couleurs acidulées de l’appartement d’Elisabeth forment un paradis artificiel. Cet univers feutré cache une réalité bien plus sombre à la vue de cet immense panneau publicitaire de l’émission fitness sur lequel donne l’appartement.

Pour faire face à ses démons intérieurs, Elisabeth cède à la substance. La métamorphose est la séquence la plus impressionnante du film. La mise en scène radicale et viscérale cherche à nous faire ressentir toute la douleur physique du personnage. La caméra scrute l’ensemble de ce corps en souffrance jusqu’à plonger dans son œil. Cette immersion terrifiante est à l’image du film qui repousse toutes les limites du body horror. L’interprétation de Demi Moore est incroyable au vu des conditions extrêmes.

Les références à Shinning de Stanley Kubrick glissées tout au long du métrage séduiront les cinéphiles. A la fois gore et féministe, The Substance prouve au cinéma français qu’on peut faire passer un message de fond par le biais du cinéma de genre. C’est une expérience visuelle et sonore inoubliable.

ThomasDeq_
9
Écrit par

Créée

le 9 oct. 2024

Critique lue 629 fois

7 j'aime

Thomas Dequidt

Écrit par

Critique lue 629 fois

7

D'autres avis sur The Substance

The Substance
Rolex53
9

Elle en pire

Elisabeth Sparkle (Demi Moore) ne fait plus rêver. Son corps se fissure un peu plus chaque jour sur Hollywood Boulevard. Une étoile sur le Walk of Fame qui ressemble désormais aux scènes fanées d'un...

le 10 oct. 2024

156 j'aime

8

The Substance
Sergent_Pepper
6

Substance (without subtext)

Idée maline que d’avoir sélectionné The Substance en compétition à Cannes : on ne pouvait rêver plus bel écrin pour ce film, écrit et réalisé pour l’impact qui aura sur les spectateurs, et la manière...

le 6 nov. 2024

99 j'aime

11

The Substance
Behind_the_Mask
3

Le voeu de la vieille

The Substance vient tristement confirmer qu'entre Coralie Fargeat et le masqué, ce ne sera jamais une grande histoire d'amour.Car il a retrouvé dans son nouveau film toutes les tares affectant son...

le 8 nov. 2024

67 j'aime

14

Du même critique

Borgo
ThomasDeq_
8

Critique de Borgo par Thomas Dequidt

Jusqu'où ira Melissa, cette attachante gardienne de prison, dont la confiance sera mise à rude épreuve par le cercle mafieux corse ? Borgo décortique les mécanismes de l'engrenage visant...

le 6 mai 2024

2 j'aime

Les Fils de l'homme
ThomasDeq_
10

Allo la terre ici bébé

Londres, 2027. L'explosion d'un café nous place d'emblée le décor. Ravagé par les guerres, les pandémies et le terrorisme, ce monde est stérile. Il n'y a plus aucune naissance depuis 18 ans. Comment...

le 9 oct. 2023

2 j'aime

Anora
ThomasDeq_
8

Critique de Anora par Thomas Dequidt

Couronnée par la Palme d'or, Anora redonne un nouveau souffle au cinéma indépendant américain. Sean Baker tend à mettre en lumière les invisibles de la société à savoir une travailleuse du sexe en la...

le 8 déc. 2024

1 j'aime