James Ivory : il y a eu un temps dans les années 1985 - 90 où je m'étais intéressé à James Ivory en découvrant des films comme "Heat and Dust" puis "Retour à Howards End". J'avais vu deux ou trois autres films dont "Quartet" avant que James Ivory s'estompe peu à peu dans les oubliettes de ma mémoire (fort volatile).
Et là, très récemment, j'ai été invité à voir cet "été afghan" au cinéma à Rouen me remettant brusquement en tête ce cinéaste.
C'est un film documentaire où James Ivory ressort du placard des rushes de film en couleur effectués en 1960 en Afghanistan pour en faire un documentaire qui n'est jamais sorti en salle.
En 2022, James Ivory, à 94 ans, décide de réutiliser tous ces documents et en profite pour remémorer sa jeunesse. Le film décrit, d'une part, en 1960, le chemin initiatique du jeune cinéaste en Inde ou en Afghanistan et d'autre part, en 2022, une sorte de bilan, de testament de ce qu'il a fait de sa vie ultérieurement.
C'est une œuvre intimiste où il parle des relations qu'il a pu nouer alors et qui ont été déterminantes sur sa vie aussi bien professionnelle que privée. C'est aussi l'occasion de parler de l'Afghanistan en 1960 qui était une contrée ouverte, au regard des images de cette époque, de Kaboul à la Khyber Pass en passant par les célèbres monuments de Bâmiyân. En contrepoint de la situation désormais obscure et infernale de ce pays.
C'est aussi l'occasion d'illustrer son propos en abordant "le livre de Babur" écrit par Babur qui fut le fondateur de l'empire Moghol au XVIème siècle. James Ivory présente Babur comme un fin lettré et un érudit humaniste qui avait fait de Kaboul sa capitale.
Honnêtement, j'ai découvert, dans le film, l'existence de ce monarque dont je n'avais jamais entendu parler. Après quelques menues recherches, ce que dit Ivory sur la culture et l'humanisme de Babur semble bien exact. Cependant, parallèlement à ses affinités intellectuelles indéniables, il fut aussi un grand chef de guerre intransigeant qui a conquis une grande partie de l'Inde jusqu'aux territoires qu'on appelle aujourd'hui Ouzbékistan…
Au-delà de l'émouvant aspect testamentaire du documentaire de James Ivory, ce que je retiens surtout de ce film, c'est cette vision, impensable aujourd'hui, d'un Afghanistan ouvert, il y a seulement 60 ans …
Vision, peut-être bien, légèrement sublimée au regard d'autres écrits comme le livre de Joseph Kessel "les cavaliers" montrant en 1965 un royaume d'Afghanistan plus archaïque, empêtré dans ses traditions …