Un homme qui dort, un homme qui veut s’effacer du monde.
Adapter le roman littéraire de Georges Perec était un risque, malheureusement je suis dubitative quant à l’équilibre fragile de ce film. Le travail au niveau du son est d'une richesse époustouflante tandis que l'image en dit beaucoup moins, c'est peut-être l'intention de l'auteur de donner en représentation un acteur désincarné pour appuyer son propos, mais pour ma part j'ai eu le ressenti que l'on pouvait se passer de l'image, que le film pouvait se lire comme un livre.
Le film se déploie sur la voix off, qui offre une richesse à travers son langage poétique, parfois brutal ou encore décousu. Le temps et la solitude sont les thématiques principales du film, l’homme qui dort est en pleine fuite existentielle face au temps qui passe, cet élément est d'ailleurs sans cesse mis en avant notamment à travers les bruits de pas, les gouttes du robinet ou encore les battements de cloche.
Derrière cette vie ennuyante et routinière à laquelle l’homme semble insensible, se cache une profonde angoisse existentielle. Alors, la fin du film prend un tournant saisissant, bien qu'il ne se transcende pas dans son existence il devient un être sensible au monde, il n'est plus spectateur de lui-même, c'est-à-dire d'un être démuni de toute substance, il devient sujet et prend en charge son existence. L'accélération et le ton crescendo de la voix off traduit une sensibilité qui s'exacerbe, et cela grâce au temps qui passe. Il ne subit plus la vie, il n'éprouve plus non plus d'indifférence face à celle-ci. Il en attend d'elle, comme il attend que la pluie tombe.