Je sais qu'en France il est de bon ton de taper sur l'ami Jeunet, notamment pour ses choix photographiques jaunis ou bien encore pour son emphase dans la narration.
...Et je vous rassure tout de suite : je ne vais pas vous la faire à l'envers en essayant de vous convaincre que ces reproches ne sont pas justifiés.
Par contre, j'avoue que j'ai un peu du mal à comprendre ceux qui ne savent pas aller au-delà de ça quand il s'agit d'aborder le cinéma de Jeunet.
Pour le coup, ce "Long dimanche de fiançailles" est encore une fois l'illustration d'un cinéma généreux, pétri d'idées et qui tente plein de trucs.
Ce film est rempli de vrais gueules, de vrais moments, de vrais tentatives...
Et puis en fin de compte il présente cette intelligence de parler de la violence de la guerre en sachant l'aborder à hauteur d'hommes et de femmes ; celle du front et de l'arrière.
Alors certes, on pourra toujours me rétorquer que sur le dernier point Jeunet ne fait que s'appuyer sur les qualités du roman qu'il adapte - ce qui est vrai - mais ce serait quand même oublier tout ce que la générosité formelle de la mise-en-scène apporte à ce récit.
Parce que des idées, il y en a à chaque plan. Parfois presque trop. Mais comment reprocher ce qui relève souvent du simple excès de générosité ?
Comment ne pas se satisfaire de ces scènes de guerre saisissantes ?
Comment ne pas être sensible à ce jeu malin de mise en opposition entre des segments de vie et des segments de mort que deux photographies opposent ?
Ce film, c'est quand même l'un des premiers qui parvient à recoloriser vraiment - au sens polysémique du terme - la Première guerre mondiale au cinéma.
On est en 2004 quand même, rappelons-le...
Alors moi je ne sais pas ce qu'il faut aux autres pour s'enthousiasmer au cinéma, mais moi, ce type de film là, ça suffit largement pour m'emporter. .
Oui, j'aime Jeunet, et j'aime ce cinéma là.
...Et je trouve ça juste dingue qu'en France on ne sache pas au moins lui reconnaitre ce mérite, au point d'ailleurs qu'il lui a fallu aller chercher des producteurs étrangers pour sortir ce film.
Franchement, quand on y pense bien, le rapport qu'on a avec ce film, ça en dit quand même beaucoup de chose de l'état de notre cinéma hexagonal...