C’est comme si Marguerite Duras avait, sur la fin de sa vie, essayé d’être, de tenter de vivre ce qu’elle avait fait vivre à ses personnages, l’amour sublime, forcément sublime. Et que Yan Lemée qu’elle avait renommé Yan Andreas avait été décevant, forcément décevant et que la seule manière qu’il lui restait de parvenir quand même au sublime c'était de faire durer cet amour jusqu’à la mort et, si possible au-delà, c’est-à-dire, de manière plus prosaïque, jusqu’à sa mort à lui. Marguerite Duras a sucé chaque goutte de la vie de Yan jusqu’à ne laisser de lui plus qu’une coquille vide, même pas une coquille, un corps vide, flasque et sans désir. Il est mort sans que personne ne s’en aperçoive et de mort naturelle. Il s’est éteint. On peut même dire qu’il a disparu et que jamais il n’a compté pour personne. Je ne pense pas que Marguerite Duras soit morte sous le nom de Duras mais sous son nom de Donnadieu, le vide suprême. Il n’y a rien à penser du monologue de l’amour de Yan Andreas car il est incompréhensible, faisant écho à l’énigme de la plupart des romans de Margerite Duras dont les phrases n’ont parfois aucun sens mais dont l’assemblage des mots crée un trouble, un vertige, une musique qui nous semble familière dans son étrangeté même et qui nous fait vivre ce que j’appellerai le bord de notre propre gouffre. Enfin la question qui m’a taraudé pendant la moitié du film, c’est · pourquoi Emmanuelle Devos a mis son gilet à l’envers ? Sacré Duras ou plutôt qu’est-ce que tu fais chier. Quand à la réalisation, c'est Claire Simon, forcément parfaite.