Pacman + le jeu du serpent + de l'eau = flOw
Premier bébé du studio ThatGameCompagny (TGC) qui depuis s'est taillé sa petite réputation comme concepteur de jeux atypiques, flOw fait un peu office de premières armes. Le concept se veut minimaliste comme l'enrobage: le but est de nager dans des eaux de plus en plus profondes tout en mangeant ce qui passe afin de faire grandir son organisme. Si cela vous rappelle Pacman et le Serpent, c'est que vous avez bien suivi !
Pour transcender ces deux jeux d'anthologie et en faire une expérience plus reposante, TGC inclut dans flOw une idée simple: le game over n'existe pas. De fait pas de stress, pas d'empressement, le joueur n'a qu'à suivre le fil du jeu à son rythme. Il est même possible de compléter les 6 campagnes en s'enfonçant dans les profondeurs sans se soucier des autres organismes du jeu.
Mais alors qu'est-ce qu'on gagne à toucher le fond ? Tout simplement le droit de rejouer en incarnant une autre créature disposant d'une autre compétence. C'est d'ailleurs le seul point qui redonnera du souffle au jeu. La plupart du temps le joueur nagera dans un niveau pour tenter d'avaler soit de petits organismes inoffensifs, soit d'autres créatures marines parfois redoutables. De fait, une fois qu'on s'est amusé à voir sa bestiole batifoler gracieusement pendant 10 minutes, la redondance s'installe. C'est l'une des limites de ce jeu expérimental: à forte dose, cela devient ennuyeux à mourir !
Ceci dit je peux comprendre que certains vouent un culte à l'amour du jardin zen ou à la contemplation d'un aquarium, alors pourquoi pas les pérégrinations aquatiques de flOw ? Ah oui, parce qu'il y a un autre souci. La jouabilité approximative gâche tout le plaisir... En effet, flOw est l'un des rares jeux à utiliser intensivement le Sixaxis, et ce afin de diriger sa créature. La maniabilité en souffre et on se retrouve souvent à tourner autour de ce qu'on vise ou à faire des demi-tour sans le vouloir. Je mentionnerai tout spécialement la créature ressemblant à un poisson dont la hitbox pour se nourrir est vraiment petite, ce qui force à faire tours et détours ! Dommage, c'était une idée sympa, mais mon poignet droit souffre encore de deux heures de jeu en dépit du fait que j'ai arrêté de jouer voilà 3 heures...
Un autre point qui m'a fortement déçu tient dans le cloisonnement des niveaux. Il n'y a pas d'obstacle à proprement parler dans chaque palier, mais ceux-ci sont délimités par des murs invisibles. Et personnellement, je trouve ces limites vraiment trop courtes ! Pour un jeu censé se dérouler dans les abysses, je m'attendais à pouvoir nager tout mon soûl dans de grandes étendues, avec plein d'organismes alentours ! Et bien non, les niveaux sont étroits, et encore plus quand votre créature approche de sa maturité et mange une partie de l'écran. Je trouve qu'on en perd l'impression de liberté qu'on aurait dû éprouver, et cela me provoque même une sensation de cloisonnement. Encore une fois, dommage.
Mais repartons sur du positif et parlons un peu de l'aspect visuel ! Car bien que minimaliste, flOw dispose tout de même d'une direction artistique plutôt soignée. Les créatures abyssales ont un design géométrique qui tend à se développer de plus en plus à mesure qu'elles dévorent des proies, dévoilant des corps plus longs sertis d'arabesques ou de grandes nageoires lumineuses. La lumière qu'elles diffusent se renforcent d'ailleurs à mesure que l'on atteint le point le plus profond. Et pour compléter le tableau, les animations de nage sont très bien réalisées, ce qui rend les mouvements agréables à regarder.
Au delà de ça, les plateaux sont vides. Chaque niveau dispose d'une couleur dominante en léger dégradée, sur lequel passent des particules plus ou moins grosses. Quelques petits effets viennent agrémenter le tout, comme un flou lors des transitions entre les niveaux. On peut d'ailleurs voir au loin le niveau qui suivra, ce qui peut s'avérer pratique pour éviter de tomber pile sur un organisme prêt à vous avaler ! Le seul point négatif finalement tiendra dans le design quasi similaire de trois créatures ressemblant à un ver. On regrette qu'il n'y ait pas eu un effort d'imagination de ce côté-là.
Enfin, faisons un petit détour du côté musique et ambiance. A vrai dire, pas grand chose à souligner, il n'y a pas de musique en dehors du "menu" de sélection, et celle-ci n'est d'ailleurs pas frappante. Du reste, les effets sonores remplissent leur office, même si ces sonorités un peu abyssales deviennent glauques à force. J'y rejouerai bien, mais sur un air de piano ou de harpe, quelque chose de plus léger tout du moins.
Donc pour résumer, flOw dispose d'un cachet artistique bien à lui, c'est indéniable ! Malheureusement ses tares sont un peu trop lourdes pour en faire un jeu recommandable. Sa maniabilité fait crisser des dents, son ambiance sonore rend dépressif, et y jouer trop longtemps provoquera irrémédiablement l'ennui. Un coup d'essai pour TGC, qui a heureusement su apprendre de ses erreurs ! Préférez-lui Journey, mille fois plus beau, mille fois plus intéressant ;)