Hatsune Miku: Project DIVA F
7.5
Hatsune Miku: Project DIVA F

Jeu de SEGA (2012PS Vita)

A priori, Project Diva a tout pour contenter l'amateur de jeux de rythme et de pépées virtuelles. Avec des dizaines d'heures passées sur tous les Space Channel Five, autant sur Elite Beat Agents et peut-être plus encore à jouer à la poupée sur les Dead or Alive Xtreme, votre serviteur (au demeurant ravagé mental à ses heures) pensait être le client parfait pour Hatsune Miku. Trouver les mots pour décrire la déception engendrée est dès lors un exercice délicat... Entre la bouillie sonore qui sert d'accompagnement musical, l'inconstance et l'imprévisibilité des rythmes à suivre, l'habillage graphique qui ressemble à un gigantesque .AVI tournant en fond d'écran, l'ergonomie générale typique des jeux japonais des années 2000, Project Diva F ressemble à une grosse, très grosse blague, qui atteint un tel niveau de "tièperie" (comme disent les jeunes) qu'on se demande encore quelle clientèle peut en vérité cibler cette étrange chose.

Commençons par le pire pour un jeu de rythme : les chansons sont ignobles. Il y a les goûts et les couleurs, on peut apprécier de temps à autre une bonne salve de J-Pop chantée par une de ces jeunes donzelles brillamment mises en scène dans un autre jeu pas si éloigné, The Idol Master. Mais la musique de Project Diva n'est pas de la J-Pop. Ce n'est pas vraiment non plus de la chanson, car les voix sont synthétiques. Pourquoi pas, après tout. Mais c'est affreux. Terrible. Abominable. Mizuguchi, Inis, où êtes-vous ? Vous pouvez crier : rien ne viendra au secours de vos tympans dans ce massacre auditif de chaque instant. Bon, peut-être que quelques pistes, en fin de parcours, seront plus tolérables à l'oreille de l'occidental moyen. Mais on n'a pas eu le courage d'en débloquer. De toute façon, la difficulté tout simplement sidérante empêchera les néophytes de progresser. Les rythmes sont complètement craqués, les boutons sur lesquels il faut appuyer sont indiqués assez tard et la marge d'erreur est faible. A part en mode facile (le premier sur quatre), c'est la galère assurée et les échecs à répétition.

Le système de jeu, sans être mauvais, n'est pas très bon. Le tutorial, très clair, semble promettre de belles choses : des icônes se déplacent à l'écran, représentant des boutons qu'il faut actionner lorsqu'elles atteignent le slot qui leur est attribué. Mais rapidement, l'idée est gâtée par un parti-pris hardcore sans aucun compromis. Pour un épisode distribué en Occident, ce Project Diva est étonnamment exigeant. Certains signes demandent d'appuyer simultanément sur deux touches, ce qui est un déjà moins instinctif et, surtout, demande des réflexes quasi-surhumains. En général, tout va beaucoup trop vite, parce qu'on est calé sur le tempo d'une musique au tempo très élevé. D'ailleurs, ne cherchez pas, mêmes les chansons dont les titres semblent indiquer un relâchement ("Melancoly", au hasard) tournent en 320 BPM minimum. Ne comptez pas non plus sur la mélodie elle-même pour vous donner des indices sur le moment où frapper les touches : il y a tellement de couches rythmiques additionnées sans aucun souci de clarté auditive qu'on n'a, en général, pas la moindre idée de celle à laquelle se fier. Pour parler de l'enrobage, il faut souligner sa médiocrité toute égale : à l'inverse d'un Elite Beat Agents ou d'un Space Channel Five qui, à leur époque, faisaient déjà l'effort d'une mise en scène par ailleurs brillante, Project Diva F ne fait que passer un clip dégueu qui semble avoir été compressé à la truelle, montrant la chanteuse se trémoussant sur une scène de concert ou chez elle avec aliasing et flou x1000. La monotonie et la prévisibilité des arrière-plans ne donnent vraiment pas envie de se surpasser.

Du coup, beaucoup de questions se posent. Où sont passés les scénarios délirants et tellement sympa du jeu de INIS, la 3D clinquante et colorée de celui de Mizuguchi ? Comment un habillage aussi grossier peut-il être validé pour un jeu générant autant de hype ? Pourquoi a-t-on confié la composition musicale à un stagiaire en production audiovisuelle travaillant au clavier/souris avec un Ableton Live piraté ? Qui a accepté de commercialiser ce produit qui tient plus de l'instrument de torture que du jeu vidéo ? Quel est l'âge du capitaine ? Tant de questions, si peu de réponses. Bon, il y a bien des trucs chez Project Diva F que ne fait pas la concurrence : un simulateur de drague très moche où on peut caresser la tête de Miku pour qu'elle soit contente (apparemment, l'idée du siècle), et la possibilité de customiser son "appart" et ses personnages en achetant des éléments avec la monnaie déverrouillée par les performances en jeu. Rayon online, la possibilité de créer ses propres rythmes, visiblement, pour les uploader. Trop tard : on a déjà capitué sous la laideur des menus, l'agressivité de l'habillage et l'ignominie (n'ayons pas peur des mots) des chansons qui font tant fureur là-bas, dans ce lointain pays qui nous a pourtant déjà prouvé avoir l’œil et l'oreille pour faire d'excellents jeux de rythme. Une seule envie, après une heure avec Hatsune : relancer Elite Beat Agents ou Space Channel Five. Il n'y a aucune honte à ça.
boulingrin87
3
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le 14 mars 2014

Critique lue 580 fois

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Seb C.

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