Dans sa préface, Françoise Flamant souligne l’ambiguïté et l’hésitation qui ont marqué la réception initiale de cette œuvre, en 1861. Elle a justement mis les mots sur le sentiment qui me reste, une fois la lecture achevée. Hésitation entre un enthousiasme sincère - qui m’a poussée à tourner avidement les pages, captivée par le côté feuilletonesque du roman, désireuse de découvrir rapidement son dénouement - et une légère déception.
C’est un style plus léger, plus fluide que je découvre dans Humiliés et offensés, contrairement aux précédentes œuvres de Dostoïevski (dits les « grands romans »). Pourtant, c'est précisément pour son aspect un peu pesant que j'avais autant admiré l’auteur. Pour la traductrice, Humiliés et offensés est « allégé de toutes les thèses magistralement développées et confrontées dans les grands romans ». Certes, quelques dialogues intéressants (je pense notamment à la fabuleuse discussion à cœur ouvert entre le prince Valkovski et notre narrateur) émaillent le récit, mais on reste quand même bien loin des considérations métaphysiques et morales des Frères Karamazov ou de Crime et Châtiment.
En somme, un roman sentimental assez mélodramatique mais par lequel on se laisse captiver, fortement rehaussé par sa dimension sociale et par les ébauches des grandes idées morales qu’on retrouvera, amplement plus développées dans les œuvres ultérieures de Dostoïevski.