En préambule
Quitte à ne pas me faire que des amis, je soutiens que comme le Prix Goncourt a pour rite de n'être décerné qu'une seule fois par auteur, il eut été de bon ton d'attendre un peu et de récompenser Romain Gary pour La Promesse de l'aube plutôt que pour Les Racines du ciel.
Non que l'ouvrage soit médiocre.
Il aurait pu faire un très bon Nobel de Littérature porté par son humanisme et son respect de la vie animale.
Mais je trouve qu'il y a (un peu) à redire dans le style de cette fiction :
- Des répétitions nombreuses et parfois insistantes ;
- Certaines longueurs qui ralentissent inutilement la lecture.
Autant de récriminations qu'il est difficile de poser à propos de La Promesse de l'aube.
Oui mais voilà. Je ferais vraisemblablement un très mauvais critique littéraire. ^^
Et l'histoire ne s'est pas passée ainsi : le Goncourt lui a été discerné 4 ans trop tôt.
Heureusement, Emile prendra sa revanche quelques années plus tard.
Sur un autre plan, quelques chiffres.
En 2021, le Botswana a fourni un quota de chasse d'environ 250 à 400 éléphants pour 130 000 têtes (avec quelques dizaines de milliers de dollars, on peut assouplir certaines limites...)
Pour rappel, le pays a une surface similaire à la France. Imaginons 130 000 éléphants sur notre territoire :
- nous comptons actuellement à peine 70 ours et 600 loups avec les humeurs que cela provoque chez les éleveurs de brebis !
- il y avait environ 100 000 sangliers en 2000 dans l'hexagone. Vingt ans plus tard, il y en a vingt fois plus !!
Pourquoi ces chiffres ?
Pour montrer que la problématique évoquée par Romain Gary est complexe et reste toujours d'actualité.
L'Afrique ne s'éveillera à son destin
que lorsqu'elle aura cessé d'être le jardin zoologique du monde.
Le sujet n'est donc pas de savoir si l'on peut tuer des animaux pour se nourrir ou pour garder intactes les cultures vivrières.
Mais bel et bien d'identifier avec quelle part d'humanité nous répondons à ce dilemme.
On mettra sûrement en vente un jour des comprimés d'humanité.
On en prendra un à jeun le matin, dans un verre d'eau, avant de fréquenter les autres.
Alors là, du coup, ça deviendra intéressant et on pourra même faire de la politique.
De nombreux hommes politiques et quelques associations de défense des animaux feraient bien de (re)lire cet ouvrage.
Car à vouloir se poster dans un camp ou dans un autre, tout le monde en perd un peu son bon sens.
Il ne faut pas choisir ce qu’on défend : la nature ou l’humanité, les hommes ou les chiens.
Non, il fallait s'attaquer au fond du problème: la protection du droit d’exister.
Il est donc admirable qu'un auteur et diplomate (ceci explique sans doute cela) réussisse - dès 1956 - à exprimer si bien ce double enjeu.
Merci Romain Gary et paix à votre âme.
Puissions nous trouver la solution dans un futur proche.
PS : les citations sont celles de différents personnages, livrant ensemble un combat dans un compromis précaire :
- les uns défendant les éléphants,
- les autres luttant pour le droit à l'autodétermination des Africains.