J'attendais un roman-fresque sur l'Amsterdam du XVIIe siècle, peut-être avais été-je trop ambitieux. le récit met long à démarrer, très long, plus de deux-cents pages. La ville, son ambiance, son décor ne sont décrits que par le biais des personnages, de leurs interactions. Une visions très aristocrate de la littérature, où tout n'est qu'apparat social.
Mais le point central du récit, c'est la formidable autonomie que l'héroïne, Nella, s'efforce d'acquérir. Elle raisonne de manière assurément moderne dans une société d'avant les Lumières. Au contraire des autres figures féminines du roman, elle ne se laisse pas écraser par les hommes, elle cherche à s'affirmer. Une rébellion aussi intérieure qu'extérieure puisqu'elle se pense contre les dictats de la société, et avec les soucis de son mari, elle se retrouve en première ligne des actions.
Un certain mystère enveloppe tout le roman. Tous les articles que fait la miniaturiste sont censés prédire la suite de l'histoire, c'est en tout cas ce dont Nella est persuadée. La maison de poupées est en ce sens une architecture du destin. C'est le deuxième intérêt du livre de Burton: il y a un véritable glissement narratif autour de la découverte des talents de vaudou de la miniaturiste: le rythme très lent, maîtrisé, comme une pose de décor, d'avant se transforme en une narration plus chaloupée, qui s'emballe. Cela coïncide parfaitement avec la relative perte de contrôle de Nella sur la trame de l'histoire: au moment où l'instance narrative semble un peu dépassée, Nella est elle-même déstabilisée par les évènements. La miniaturiste prend alors la mesure du récit, par procuration.