Saison 1 (7/10) :
Sur un univers qui m'est totalement étranger (et ne m'intéressant qu'assez peu, je l'avoue), « Dix pour cent » s'avère suffisamment maligne et bien pensée pour que l'on se prenne vite au jeu. Plusieurs raisons à cela, dont celles de proposer un récit relativement ambitieux (dans le registre du divertissement) tout en prenant soin d'écrire des personnages forts, marquants, certains plus attachants que d'autres mais tous construits avec un vrai talent comique et dramatique, d'autant que l'interprétation (rarement le point fort des séries françaises) est ici à la hauteur, dont l'excellente Camille Cottin, sans oublier une galerie de seconds rôles particulièrement en verve, Nicolas Maury et Laure Calamy en tête.
Ça n'est toutefois pas aussi jubilatoire, tranchant qu'on aurait pu l'espérer, car si le ton est volontiers moqueur, on reste quand même dans les limites du politiquement correct : un peu de vacherie dans l'écriture et les situations, mais rien de vraiment virulent. Néanmoins, et malgré une qualité (logiquement) inégale entre les épisodes, voir des vedettes (plus ou moins importantes) venir se parodier est assez savoureux, les situations proposées étant souvent assez marrantes
(mention spéciale à Audrey Fleurot en mère complètement débordée et complètement à côté de la plaque, elle qui n'avait pas encore d'enfant à l'époque du tournage!).
Pas de coup de cœur, mais une série hexagonale intelligente, n'allant pas jusqu'au bout de son potentiel « corrosif », mais offrant une plongée stimulante et souvent drôle d'un milieu important pour le cinéma et ses comédiens : plutôt réussi.
Saison 2 (6/10) :
Si la note est presque identique pour cette seconde saison, l'impression est plus mitigée. D'abord, l'intrigue autour de la situation familiale de Mathias prend beaucoup plus de place et a tendance à vampiriser le reste, lui faisant perdre une partie de son intérêt (même si on continue de la suivre avec un certain plaisir). De plus, alors que les « guest-stars » du premier volet en imposait souvent, ici le choix est moins convaincant, que ce soit
Norman Thavaud
ou les apparitions de Julien Doré, par ailleurs honnêtes. Même la grande
Isabelle Adjani
n'apparaît pas assez dans « son » épisode pour rendre ce dernier vraiment réussi (et Dieu sait si elle irradie l'écran à chaque apparition!).
Moins efficace, donc (et moins drôle, aussi), mais pouvant toujours compter sur une belle troupe de comédiens (notamment chez les seconds rôles, Nicolas Maury et Laure Calamy faisant à nouveau des merveilles), la relation entre Andréa et Colette prenant une tournure vraiment touchante, l'arrivée d'un nouveau patron au premier abord caricatural apportant en définitive un peu de piquant à l'intrigue. Enfin, les deux derniers épisodes avec
Guy Marchand (dont on aurait bien envie de voir en « vrai » le film qu'il tourne!) et surtout Juliette Binoche (en grande forme)
permettent de raviver la flamme qui faisait le charme de la première saison. Inégale, même un peu décevante, mais suffisamment agréable et mordante pour en faire une des séries françaises à suivre actuellement.
Saison 3 (6/10) :
Assurément, l'effet de surprise est passé et cette troisième saison n'a plus la saveur des débuts. C'est particulièrement palpable dans la première partie, où l'on a beau sourire des situations et des doutes (parfois bien superficiels) des guest-stars, donnant toujours une légère impression de déjà-vu, de tenter de se renouveler sans réellement y parvenir. Non pas que ce soit désagréable, loin de là, mais on a presque l'impression que ces vedettes apparaissent plus comme un gadget qu'un réel apport aux scénarii.
Je me suis même surpris à être nettement plus intéressé par les problèmes de l'agence et les tensions entre ses différents membres (Camille Cottin y est toujours aussi irrésistible), Fanny Herrero prenant le soin de modifier (sans doute un peu trop) notre ressenti sur la personnalité des uns et des autres
(celle d'Hicham en premier lieu).
Heureusement, dans la dernière ligne droite, la série parvient à retrouver un peu de cette folie qui la caractérisait, cette dimension légèrement imprévisible, notamment avec l'épisode consacré à
Isabelle Huppert,
puis le dernier, savoureux, renouant pleinement (et de façon totalement assumée) avec l'esprit de la première saison.
Enfin, si les invités sont ici un peu inégaux, et j'ai beau ne pas être fan, j'ai trouvé le récit consacré à
Béatrice Dalle
vraiment réussi, celle-ci s'y livrant avec beaucoup de sincérité et, osons l'écrire, de pudeur. Cette seconde moitié, faisant également la part belle aux seconds rôles (notamment l'inénarrable Nicolas Maury et la tempête Laure Calamy) permet de terminer sur une bonne note, à défaut d'être aussi réjouissante et piquante que n'avait pu l'être la fiction au départ. Je suivrais (évidemment) la quatrième (et dernière?) saison avec plaisir, tout en restant lucide sur le fait que « l'âge d'or » de « Dix pour cent » s'est très probablement arrêté il y a déjà quelques temps.
Saison 4 (7/10) :
Alors, dernière saison ou pas ? Dominique Besnehard, en talentueux promoteur, a savamment laissé planer le doute suite à la diffusion de l'épisode six, qui serait une conclusion plus qu'acceptable si jamais « Dix pour cent » devait en rester là. Pas mal de changements niveau créateurs, les « historiques » Fanny Herrero et Cédric Klapisch ayant quitté l'aventure, sans que cela ne ressente trop dans la qualité. Certes, quelques vraies faiblesses et incohérences pouvant clairement surprendre, que ce soit une poignée de sous-intrigues assez lourdaudes ou certains aspects qui, s'ils permettent de créer un peu de suspense, ne tiennent clairement pas la route niveau crédibilité (je pense, bien sûr, au rôle d'Anne Marivin (pas mal du tout, par ailleurs)), pesant parfois sur l'intérêt de l'œuvre.
Inconstance également dans les « péripéties » vécues par la vedette de « son » épisode, avec une préférence marquée pour
José Garcia,
décidément formidable lorsqu'une belle opportunité se présente, ceux de
Sandrine Kiberlain et éventuellement Franck Dubosc
restant assez drôles, notamment dans leur mise en abyme parfois inattendue. En revanche, légère déception concernant
Sigourney Weaver,
amusant mais dont on pouvait espérer plus face à une telle « guest-star ».
Au final, l'esprit de la série reste intact, si ce n'est un soin moins important chez les personnages secondaires (Ophélia Kolb est ici totalement sacrifiée), les grosses faiblesses scénaristiques évoquées précédemment ou une fantaisie moins évidente (à quelques exceptions), mais assume aussi une mélancolie plus affirmée, n'hésite pas à mettre (vraiment) ses héro(ïne)s dos au mur ou à imaginer des situations assez dramatiques, en premier lieu cette fin qui, bien que préparée depuis un moment, surprend par son amertume, certes douce, mais réelle. Alors même si tout n'est pas parfait, que le casting des « invités » est inégalement exploité, cette (probable) dernière saison touche plus que les précédentes, offrant pas mal de sourires et de situations fortes tout en montrant des personnages faillibles ne retombant pas (encore) sur leurs pattes une dernière fois. Des adieux (?) en légère demi-teinte, mais plutôt réussis.
Critique globale (6,5/10) :
Attiré d'emblée par cette série se plongeant indirectement dans les coulisses du cinéma à travers le quotidien d'une agence artistique devant aussi bien faire face à une rude concurrence qu'à ses vedettes pas toujours évidentes à gérer, « Dix pour cent » fait partie de ces quelques séries où j'avais beau être un peu déçu à chaque fois, je ne pouvais m'empêcher d'attendre la suite avec une certaine impatience. L'œuvre m'a ainsi toujours laissé un léger goût d'inachevé, dû à ses quelques lourdeurs, à ne jamais réussir à se sublimer, à aller aussi loin qu'elle ne pourrait dans sa mise en abyme ou son regard finalement assez indulgent sur le milieu, chacun finissant (presque) toujours par montrer une belle image de soi.
Mais sans doute n'était-ce de toute façon pas le but de Fanny Herrero et Cédric Klapisch, tant l'esprit reste régulièrement positif dans l'intrigue principale comme celle se focalisant sur une nouvelle vedette à chaque épisode : se moquer de soi-même, d'accord, mais pas trop
(Audrey Fleurot et à l'extrême rigueur Sandrine Kiberlain ou Juliette Binoche sont les exceptions qui confirment (un peu) la règle).
Pour les spectateurs qui, comme moi, aiment le cinéma, il y a un vrai plaisir à fréquenter les membres d'ASK, tous forts bien interprétés (in Camille Cottin and Laure Calamy I trust), dont les personnalités très différentes créent une osmose séduisante, quitte à en faire parfois un peu trop, tout en appréciant le « festival » de vedettes offrant un panel d'enjeux et situations assez riches, parvenant (relativement) à se renouveler au fil des saisons
(mention spéciale à François Berléand et José Garcia).
Dommage toutefois que la première saison reste d'assez loin la meilleure, exploitant au mieux certains aspects aussi ridicules que dérisoires dans ces guerres d'ego et d'image souvent bien vaines, ce qui ne les rend que plus savoureuses. Le reste oscille entre moyen et pas mal du tout, faisant régulièrement preuve d'inconstance, y compris lors d'un même épisode. Maintenant, avec une vision d'ensemble, il y a de quoi apprécier cette production originale, nous intéressant à un milieu qui ne l'est pas forcément et prouvant constamment son amour pour le septième art, écrite souvent avec habileté jusqu'à un dénouement offrant une (probable?) sortie digne de ce nom à chacun. Frustrant ? Sans doute. Séduisant et assez recommandable ? Aussi.