Saison 1 (8/10) :
Il faut le reconnaître : j'étais un spectateur (presque) déjà conquis d'avance. Production Showtime regroupant plusieurs grands personnages de la littérature fantastique de l'époque victorienne portée par un casting aussi éclectique que séduisant : une déception aurait été terrible... Il n'en a rien été. Premier constat : c'est beau. Mais vraiment très, très, très beau, décors, costumes et surtout photographie nous offrant un festival de couleurs et de lumières auquel il est difficile de résister. De plus, si l'intrigue principale traîne parfois très légèrement, elle est largement compensée par le soin et l'amour de John Logan pour ses personnages, aussi bien ceux venant de la littérature (Victor Frankenstein et sa créature, Dorian Gray) que les créations originales, trouvant chacun un équilibre entre mystère et caractère souvent très affirmé, les relations tissées les uns avec les autres offrant ainsi pas mal de possibilités et rendant toujours intéressants les doutes et interrogations de chacun devant l'adversité.
À ce titre, sans jamais virer « prise de tête », la série reste toujours un minimum complexe, pas forcément très riche en action mais avec suffisamment d'enjeux pour que cela passe sans le moindre souci. Il faut dire que si tous les comédiens sont à la hauteur (quel plaisir de revoir Josh Hartnett et Timothy Dalton dans des rôles dignes de ce nom, sans oublier la participation du toujours excellent David Warner), comment éclipser Eva Green, absolument fascinante de bout en bout, aussi bien par sa beauté étrange que par sa présence quasi-hypnotique : difficile, que dis-je, impossible de résister. Alors l'excès n'est parfois pas loin, le grotesque non plus. Mais qu'importe : devant autant de qualités irradiant cette production aux moyens importants mais se donnant surtout les moyens d'être une série importante, cette première saison est un régal : cinéphiles, littéraires, amateurs de fantastique et de gothique, précipitez-vous, et n'ayons qu'un seul souhait : que la deuxième saison soit à la hauteur des promesses faites ici...
Saison 2 (6/10) :
La première saison m'avait conquis, cette suite, dotée pourtant d'une excellente réputation... beaucoup moins. Moins de liant, moins d'intensité et surtout un scénario beaucoup plus faible, s'étirant comme pas permis, notamment concernant cette histoire de sorcières ou les diverses problèmes des personnages, que l'on dissout petit à petit afin de tenir dix épisodes. Après, cela reste « Penny Dreadful » : c'est MA-GNI-FI-QUE visuellement, l'univers reste assez riche, et si, comme moi, vous êtes inconditionnels des créatures fantastiques (plus ou moins) imaginées à l'époque victorienne, vous devriez un minimum y trouver votre compte.
D'ailleurs, certaines choses m'ont plu, notamment la relation Vanessa Ives - Victor, la présence séduisante d'Helen McCrory ou encore un jeu de dupes plutôt bien mené entre certains protagonistes. Sans oublier Eva Green, de très loin la créature la plus fascinante du « show » : sa beauté, sa présence, son regard sont quasiment sans égaux, son personnage demeurant d'assez loin le plus séduisant. Reste qu'au vu de l'attente qu'avait su créer chez moi le premier volet, la déception est réelle, en espérant que la série saura se conclure en beauté.
Saison 3 (7/10) :
Ils sont venus, ils sont tous là : pour cette ultime saison de « Penny Dreadful », quasiment tous les personnages emblématiques de la littérature fantastique anglaise du XIXème sont présents (« L'Homme Invisible » excepté, ou alors simplement ne le voit-on pas ! (Rires bruyants)), donnant au spectacle l'impression d'une grande réunion de vieilles connaissances, pour le plus grand plaisir de votre serviteur. D'ailleurs, j'avoue qu'après une deuxième saison fort décevante, ce dernier volet se remet à flots avec une certaine aisance, renouant à pas mal d'égards avec ses brillants débuts, tout en creusant de nouvelles pistes, souvent intéressantes, notamment l'intégration du western avec cette partie américaine plutôt réussie.
Dommage que le manque de densité se ressente à plusieurs reprises, certains épisodes apparaissant surtout décoratifs (et quels décors, en passant!), de vrais temps faibles étant à noter durant ces huit heures qui auraient pu être moindres. La recherche de « phrases qui tuent » se ressent un peu trop, et si certaines font leur effet, c'est parfois « too much ». Mais il y a de l'ampleur, une puissance visuelle saisissante et une dramaturgie forte, dans les différents récits (notamment celui de Dorian Gray et Lily), John Logan accentuant l'image profondément tragique de Vanessa Ives, héroïne maudite dont la trajectoire nous aura réellement touchés, surtout lorsqu'elle est interprétée par une Eva Green aussi splendide qu'intense.
Quant à la conclusion, c'est vrai qu'elle a de quoi déconcerter : d'un côté, elle boucle pour de bon la série par
la mort de la belle Vanessa,
de l'autre, certains récits ne semblaient pas être arrivés à terme : au final, cela me paraît relativement cohérent, restant jusqu'au bout dans sa logique gothique et ténébreuse. Bref, sans finir en apothéose, forçant un peu trop la dimension légendaire de ses personnages, cette troisième saison reste une sacrée orfèvrerie et un présent de choix pour les amateurs de fantastique littéraire et cinématographique : so long, Vanessa.
Critique globale (7/10) :
Il faut reconnaître que cette série partait avec pas mal d'atouts pour plaire à votre serviteur : revenir aux fondamentaux du fantastique, proposer une galerie de personnages incarnant l'âge d'or victorien du genre (ou les « Universal Monsters », ce qui est presque aussi bien), un univers visuel foisonnant et un casting aussi hétéroclite que séduisant emmené par la splendide Eva Green... À ce titre, malgré un léger manque d'incarnation concernant les Forces du Mal, la première saison est une belle réussite : prenante, formellement splendide et dotée d'une dramaturgie très forte, notamment dans la relation entre les différents protagonistes, suscitant ainsi une réelle attente entre chaque épisode et la suite des événements.
Malheureusement, le second volet ne va pas être loin de la douche froide : si on y trouve cette fois des antagonistes dignes de ce nom, le récit s'avère souvent poussif et sans envergure, seules quelques scènes et le soin apporté aux décors à comme à la photographie me permettant de suivre avec un minimum d'intérêt. Restait donc à savoir de quel côté allait pencher la série pour son ultime saison : bonne nouvelle, celle-ci renoue bien plus avec ses débuts qu'avec sa suite, tout en ayant l'intelligence de creuser de nouvelles pistes, à l'image de cette séduisante partie
« western » ou l'arrivée de nouvelles figures mythiques, le Docteur Jekyll et Dracula en tête,
sans oublier cette belle création qu'est Catriona Hartdegen, interprétée par la flamboyante Perdita Weeks. Un léger manque de densité, parfois, au point de se dire qu'un ou deux épisodes en moins n'auraient pas été dramatiques (ce qui, j'ai l'impression, est de plus en plus souvent le cas avec les séries actuelles), mais une vraie dramaturgie, un « romantisme gothique » de belle facture et quelques sous-intrigues assez fortes, notamment celle autour de Dorian Gray et Lily.
Jusqu'à ce dénouement, que certains pourront trouver frustrant (ce qu'il est probablement un peu), mais ne cédant nullement à la facilité et se concluant dans une forme de poésie du plus bel effet
(Wordsworth, ça fait toujours classe),
offrant une fin (plus ou moins) satisfaisante à chacun, notamment à notre chère Vanessa Ives, figure tragique par excellence. Bref, si tout n'est pas parfait durant ces vingt-sept épisodes, qu'un récit plus dense eut pu amener « Penny Dreadful » vers des cimes extrêmement élevées, celle-ci reste une œuvre à part, renouant élégamment avec un certain classicisme tout en y apportant une puissante identité formelle : la série avait beau s'adresser avant tout à des spectateurs comme moi, cela n'enlève rien à sa réussite globale.