The Knick : attention ça risque de piquer un peu
Blasés ? Goût de déjà-vu ? Fort dégoût pour le prénom Meredith ? Nausées rien qu’à l’idée d’aller à Seattle ?
Vous souffrez de tous ces symptômes?
N’en dites pas plus : vous êtes victimes de ce qu’on appelle le syndrome post-traumatique d’Urgence, d’une carence de Scrubs et d’un fort manque de House.
Laissez-moi vous prescrire un bon shot de 10 épisodes des laboratoires Cinémax mis au point par le bon docteur Soderberg.
Allez on ouvre grand la bouche et on dit : Clive Owen !
New-York. 1900. John Thackery (Clive Owen plus-sombre-tu-meurs), brillant chirurgien travaille d’arrache-pied et aux forceps pour mettre au monde ce qui sera la médecine moderne. Médecin tout ce qu’il y a de plus non-conventionnel, il utilise des méthodes que l’on peut considérer soit comme totalement visionnaires ou soit comme totalement aberrantes dans le seul but de faire progresser la médecine. Il est encouragé et aidé par une équipe médicale comme administrative animée par le même désir d’avancée technique.
Néanmoins, n’allez pas voir dans The Knick, une bluette altruiste et pleine de bons sentiments. Nononon, vous feriez fausse route. L’équipe que l’on voit évoluer est à l’image de la ville de New-York au début du XX e siècle : inquiétante, corrompue, carriériste, droguée et raciste. En effet, si notre “bon” docteur Thackery, poursuit sa course dans la mise au point de la chirurgie moderne c’est avant tout poussé par sa soif de réussite, son orgueil qui n’ont d’équivalent que son addiction à la cocaïne. Hormis peut-être, le mignon Bertie (aah Bertie), tous les personnages ont une part sombre plus ou moins visible, plus ou moins excusable.
Bien, Bien. Si je résume nous avons là un anti-héros : cocaïnomane, boursouflé d’orgueil… cela nous rappellerait bien un certain House non ?! Certes. Mais viteuf en fait. Parce que d’une part, on est pas sur la FOX et que d’autre part, House même si je ne nie pas son côté révolutionnaire en son temps, était surtout un bad doctor à mener sur la bonne voie alors que là, il n’est absolument pas en recherche de rédemption. C’est plutôt l’inverse : plus on s’enfonce dans la série, plus il s’obscurcit et se radicalise.
Mais il s’agit bien d’une série dramatique médicale comme il y en a eu tant me direz-vous. Ce à quoi je répondrais :
Nenni.
Enfin, oui bien sûr, c’est une série dramatique à l’instar de Grey’s nanard (qui a dit que j’étais mauvaise avec la Bande à Méredith ?! c’est pas gentil de montrer du doigt.) mais et là, insiste, énorme MAIS, c’est intelligent parce qu’extrêmement humain et loin des schémas manichéens ou traditionnels où tout le monde il est beau et amoureux.
Et puis le concept est original. Au lieu d’évoluer dans à notre époque, Soderberg a choisi de planter son décor au début du Xxe siècle et dans un New-York qui n’a rien de celui de Friends : insalubre, corrompu, raciste autant de pistes intéressantes qui sont développées au fil des épisodes. Le racisme en étant un peu le fil rouge : doit-on exclure un excellent praticien du simple fait de sa couleur ? Mais aussi comment le faire accepter des patients qui refusent de se faire toucher par un homme de couleur ?… De même, une véritable réflexion est dessinée sur la condition féminine que cela soit sur le droit de prétendre à un emploi autrefois réservé aux hommes celui d’administrateur ou bien sur celui à disposer de son corps. Le personnage de la nonne Harry est tout simplement formidable car plein de contradictions mais aussi d’humanité.
Alors oui, c’est sombre et cru (âme sensible s’abstenir, les images sont très très TRÈS réalistes) mais ce n’est jamais gore. Si cela flirte avec l’horreur propre à la misère humaine, les scènes d’opération ne sont pas là pour écoeurer, effrayer ou même choquer mais bien telle une peinture réaliste du 19e siècle, elles représentent la réalité des premiers temps de la médecine moderne. D’ailleurs, la photographie est très belle, tout y est blanc sur sombre, symbolisant cette ambivalence qui anime les personnages tiraillés entre leur part d’ombre et de lumière.
L’ensemble est magnifié par l’usage inhabituel de musique électro qui rythme l’action de façon juste et subtile, mimant les crises de manques de Thackery ou encore son enthousiasme.
Le rythme sans être rapide est prenant et il suffit du pilote pour être convaincu.