On le savait déjà, Zemeckis est le maître du voyage dans le temps. Et voici qu’il nous fait à nouveau voyager d’une toute nouvelle façon. Pour cela il a posé sa caméra à l’aube des temps jusqu’à nos jours, sans bouger l’objectif et ça marche. Se succèdent les dinosaures, les amérindiens, une maison coloniale et une maison construite en face où se déroule l’essentiel des histoires. Au début on est un peu perdu face à l’enchaînement des récits, des générations, des allers et retours dans les diverses époques et puis on trouve ses repères. On s’attache aux personnages, on perçoit à travers ces quelques tranches de vie qui se déroulent les espoirs, les rêves abandonnés en cours de route avant des les retrouver, les regrets, les amertumes, les impasses existentielles, les souvenirs qui s’effacent ou qui reviennent et aussi les joies simples. Ce salon prend chair, il est témoin de tout ce qui se passe : la vie qui grandit, la mort et la vie qui continue. Et au delà des personnages on perçoit les changements de société comme l’apparition de la télévision ; l’époque de la femme au foyer à celle où les femmes aspirent à s’émanciper avant de finir par le faire. L’époque où l’on restait ensemble quoi qu’il en coûte, quitte à s’éteindre doucement, à celle où le divorce fait partie du paysage.
Côté technique, c’est très maîtrisé. Pas de travelling donc ni de champs et de contre champs et pourtant la réalisation est dynamique grâce à l’enchaînement des plans qui se mêlent, s’incrustent, se fondent en douceur. L’évolution du décor du lieu participe beaucoup à ce dynamisme. Les acteurs passent par les divers âges de la vie et l’équipe de Zemeckis a fait appel studio d'effets visuels Metaphysic et c’est très réussi. On retrouve par exemple un Tom Hanks tout jeune grâce au travail sur des images d’archives numériques.
Le travail sur le lieu est remarquable, on perçoit à la fois comment des humains habitent un endroit au sens où ils l’investissent et laissent sur lui leur empreinte mais aussi comment le lieu conditionne les humains, comment ils peuvent s’en trouver prisonniers ou s’en affranchir.
Et c’est finalement dans un travelling que nous quittons le film en sortant de ce lieu dans lequel nous sommes restés durant un peu plus de 1h30 en prenant connaissance de l’environnement de cette petite maison.
Here, c’est du beau cinéma, plein de cœur et toute en modestie à l’image de la vie des êtres humains qui se succèdent sans bruit. Encore une belle pépite cinématographique de la part d’un réalisateur qui à l’image de ce film a su traverser les diverses époques en se renouvelant toujours prêt à de nouveaux défis.