C'est comme si, lassé de voir le cinéma prendre la poussière, enfermé dans ses codes immuables et routiniers, John Cassavetes avait voulu faire souffler un vent de liberté sur ce film en expérimentant, apprenant même, lors de sa réalisation.

Shadows, ce sont des acteurs qui improvisent, ne sont pas entravés par des marquages au sol. La belle Lelia, forte et fragile. Ben, mystérieux et charismatique, le menton enfoncé dans son blouson. Hugh, chanteur relégué à des clubs de troisième zone, devant prostituer son art pour continuer à cachetonner.

Shadows c'est déjà le don de Cassavetes pour choisir l'endroit, toujours des plans parfaits et un New York, non pas de carte postale, mais beau.

Shadows c'est Charles Mingus qui improvise tout du long, donnant à l'ensemble une bande originale originale et qui swingue comme jamais.

Shadows c'est une réflexion sur le racisme envers ces trois frères et soeurs noirs ou métis, sans paternalisme ni bon sentiments ni mélodrame. Juste un constat.

Shadows c'est le bruit de la caméra qui tourne et que masque à peine le dialogue de Hugh et Rupert.

Shadows ça pourrait donner l'air d'un truc trop expérimental et ressemblant à un documentaire mais il n'en est rien. C'est un moment d'art, de cinéma, de magie... De ce que vous voulez.

Shadows c'est cette petite phrase mise dans la bouche de l'un de ses personnages "Prendre des cours ? Donnés par qui ? Par des gens qui m'enseigneraient ce qu'eux n'ont jamais réussi !?"

Shadows ça se finit sans se terminer, sans FIN en grosses lettres sur votre écran, on laisse juste Ben là où on l'avait trouvé 1h20 plus tôt, se fondant dans la foule dense des trottoirs new-yorkais.
Pravda
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le 16 janv. 2014

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Pravda

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